J’ai testé pour vous : la parfumerie Fragonard

A Grasse, l’économie et le tourisme sont axés sur le parfum. Les anciennes parfumeries ont misé sur les visites et les musées pour survivre. Molinard, Fragonard… Petit tour du musée et de l’usine de Fragonard.

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Grasse est la capitale mondiale du parfum. La ville compte une trentaine d’usines à vocation plutôt internationale et une vingtaine d’exploitations cultivant les fleurs, essentiellement le jasmin, la rose et la tubéreuse, les trois reines de la parfumerie. Petite ville bénéficiant d’un microclimat, sa situation géographique l’a mise au cœur des conflits territoriaux. Minuscule ville fortifiée, elle s’est orientée vers la tannerie dès le XIIe siècle, grâce à l’abondance dans la région de lentisque et de myrte, utilisés comme tan. Au XVIe siècle, Catherine de Médicis importe à la cour française la mode italienne des gants parfumés, pour cacher l’abominable odeur des peaux. C’est ainsi que la parfumerie naît de la ganterie pour prendre son essor au XVIIe. Grasse connaîtra de grandes transformations dues à la parfumerie dans la ville et tout autour pour l’extension de la culture des fleurs.
Aujourd’hui, les fleurs sont moins visibles. Ce sont les panneaux publicitaires qui fleurissent pour attirer les touristes vers les visites d’usines de parfumerie locales. Molinard, Fragonard et Galimard en sont les principaux représentants.

En plein centre ville, une grande bâtisse interpelle : c’est l’usine historique de Fragonard, depuis ses débuts en 1926. Elle abrite un petit musée et on peut visiter également ce qui reste de la partie production. La visite commence par le musée, sur un étage. La première partie présente d’anciens flacons des XVIII et XIXe siècles, des nécessaires de voyage, des lettres commerciales et administratives, les laissez-passer de la Seconde Guerre Mondiale.

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Ensuite, une nouvelle salle se penche sur l’histoire de la famille : un mur est dédié à une grande chronologie avec les grandes dates et des images noir et blanc, dont des portraits des dirigeants anciens et actuels. La salle suivante propose un voyage vers des terres et des temps plus lointains grâce aux petits flacons et outils de maquillage de l’Orient, l’Égypte, la Grèce et la Rome antiques. Dernière partie du musée, l’escalier qui descend vers la visite de l’usine est ornée d’étiquettes.
Les visites sont organisées en groupe, par intervalles réguliers. Elles commencent à l’envers, par le conditionnement. Selon l’heure et le jour de la visite, vous pourrez voir les ouvrières à l’œuvre.

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La guide vous emmène ensuite vers de nouvelles salles pour découvrir les techniques d’enfleurage et les filtres.

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Dès ce stade, les salles font davantage penser à un écomusée qu’une usine : panneaux, photos, vitrines viennent compléter vos connaissances techniques.

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Puis la fabrication de savon avec ses moules. Chaque usine dispose de ses propres moules, apprend-on. A Grasse centre, l’usine moule ses savons en formes d’œuf.

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Ensuite, on découvre les alambics utilisés pour l’extraction des essences. Pour finir, petit tour devant le laboratoire « où tout se décide ». Les flacons y sont graphiquement disposés de chaque côté. La modernité tranche avec tout ce qui a été présenté précédemment. Et c’est sur cette dernière note qu’on nous conduit vers la sortie, ou plutôt la boutique. Tous les produits parfumés y sont présentés : savons, eaux de toilette, gels douche.
Et le livre « Fragonard 80 ans de passion » édité en 2006.

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Joli format, le livre, dès la couverture, induit une histoire familiale et locale. Et pourtant, c’est plutôt une mini encyclopédie « maison » du parfum. Bien que richement illustré, le livre donne surtout dans les généralités : l’histoire du parfum depuis l’antiquité, les matières premières, les techniques de fabrication, les familles de parfum, Grasse, les nez… Sujets survolés, on n’y apprend finalement pas grand-chose. L’auteur en profite pour rétablir quelques vérités, comme le fort doute subsistant concernant la venue de Catherine de Médicis à Grasse. Là n’est point pourtant la plus grosse bévue circulant autour des maisons grassoises : nombre de sites (dont certains relevant de la région) font ainsi référence à Galimard, gantier parfumeur. D’après ces sites, ce tanneur de Grasse aurait eu l’idée des gants en cuir parfumé. Il aurait offert une paire à Catherine de Médicis, qui, séduite, l’aurait fait connaître à la cour. Sur son site, Galimard ne se prévaut pourtant que d’être l’entreprise créée par Jean de Galimard en 1747, fondateur de la corporation des gantiers parfumeurs. Catherine de Médicis (1519-1589) aurait en effet bien eu du mal à rencontrer ce gantier !!! Évidemment « Fragonard 80 ans de passion » ne mentionne pas cette entreprise concurrente. Mais le livre n’évite pas non plus les approximations historiques et on se perd un peu dans les dates se rapportant à la corporation des gantiers parfumeurs.
L’ouvrage ne laisse finalement qu’une vingtaine de pages à la Maison Fragonard. Que sait-on au final de la culture familiale maison ? Le fondateur a tout bonnement saisi une opportunité commerciale : le tourisme et les fleurs de Grasse, pour vendre des produits parfumés en direct aux touristes. Le nom de Fragonard est donné à l’entreprise en référence au peintre du XVIIIe Jean-Honoré Fragonard. Et l’entreprise est restée dans la famille jusqu’à ce jour. Seuls faits marquants rapportés : la collection d’objets liés à la parfumerie de Jean-François Costa, un des gérants de la lignée. Collection qui a donné naissance à un autre musée parisien et un autre livre en 2008. Et enfin l’attrait de la Maison pour les traditions provençales.
Somme toute, le livre est fidèle à la visite : généraliste et léger, de bonne volonté mais… où est donc l’âme de Fragonard ?

Pas très loin de là dans les rues, une autre boutique Fragonard… cette fois il s’agit de Fragonard Maison. L’entreprise s’est diversifiée dans la vente de linge de maison, boutis, verrerie et vannerie, huiles aromatiques : la Provence exploitée dans tous ses territoires.

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Photos : SB

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